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02/05/2012

Dictée

Voici la dictée "pas piquée des hannetons!" (selon les organisateurs) qui a eu lieu au SALON DU LIVRE DE GENÈVE, lors de la DEMI-FINALE DU CHAMPIONNAT SUISSE D’ORTHOGRAPHE 2012 :


Un camé(e) chez ma tante

Je l’avais rencontré au mont-de-piété où il était venu mettre en gage un camée, une superbe sardonyx, véritable chef-d’œuvre de la glyptique antique, qui représentait un groupe de satyres épiant, derrière un rideau de laîches, Psyché et ses suivantes au bain.

Dans le café où nous nous étions attablés devant un verre de graves grand cru classé qu’il avait tenu à me faire déguster, il me confia que cette pierre d’une extrême finesse avait été offerte par l’empereur Tibère à son précepteur. En 410, lors du sac de Rome, elle tomba entre les mains d’un reître des hordes  wisigothes qui en fit cadeau à son amie, une espèce de pythonisse byzantine.

Elle resta dans la famille de cette femme jusqu’à l’arrivée des croisés à Constantinople, où elle fut dérobée par un page caennais qui, ignorant sa valeur, la remit à son seigneur. De retour en Normandie, celui-ci la mit sous clé dans une salle du donjon de son  château fort. Survint la guerre de Cent Ans accompagnée de son cortège d’exactions. Le château fut incendié et la pierre perdue, oubliée.

Quelque quatre siècles et demi plus tard, un promeneur qui cueillait des champignons la retrouva, quasi intacte, au milieu d’un groupe de pézizes, dans le chaos des ruines. Il voulut en faire don au Louvre qui, doutant de son authenticité, la refusa.

De dépit, il la vendit à un lord anglais, celui-là même qui avait fait mettre au British Museum – les avait-il volées ou achetées ? -  les métopes sculptées du Parthénon représentant le combat des Lapithes et des Centaures. L’Anglais mourut en 1841 en léguant par testament le fameux camée à mon ancêtre, qui, propriétaire d’une bonneterie et d’une chapellerie dans le Marais, était devenue et sa fournisseuse en couvre-chefs et son amie intime. 

Il se tut un long moment, puis, jetant tout à coup sur la table une liasse de billets de cent euros, il soupira : «Et voilà tout ce qui reste de cette histoire ! Mon camée chez ma tante ! Quelle tristesse ! Mais je n’avais pas le choix.  Mes lignes de coke me coûtent de plus en plus cher.» Puis il se leva brusquement, reprit les billets et me salua, me laissant régler l’addition.

 

 

F. Klotz

 

Sous le contrôle du jury

 

Présidé par P. Mayoraz 

 

Variantes : bonnèterie, pezizes, centaures, laiches, coutent, reitre

 

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